DISCLAIMER : Cet article est la vision inverse du précédent “Dystopie“. Les propos, tant dans cet article que dans le précédent, sont exagérés et n’engagent que moi.
Nous sommes le 1er Janvier 2020, le bug de l’an 2000 n’a pas eu lieu mais c’est bien celui de l’an 2020 qui a frappé.
La France se réveille sans RH
Les salariés découvrent dès le retour du réveillon le 2 Janvier, des entreprises dépourvues des services « Ressources humaines ». Ils ont tous disparus des entreprises, comme évaporés.
Que se passerait-il alors ?
Nous sommes le 13 Février 2020.
Fanny, Recruteuse chez Utop, a oublié d’acheter un cadeau à sa copine, Nina. Elle demande à son manager, Bruce, COO de s’absenter quelques minutes.
Bruce accepte volontiers et lui rappelle une nouvelle fois qu’il faut arrêter de le prévenir pour une aussi petit absence. Elle peut évidemment vaquer à ses occupations et peut même rentrer chez elle et finir la journée en télétravail.
Plus besoin de formulaire papier à imprimer, signer et scanner à la responsable RH en mettant le monde entier en copie.
Les collaborateurs sont en effet désormais tous formés aux aspects juridiques depuis la fin des RH. Ils font énormément attention à la RGPD, sont devenus des experts en droit social.
Ils n’ont plus besoin de poser 1001 questions sur les périodes d’acquisition des congés, le fonctionnement d’une fiche de paye ou quel formulaire envoyer pour faire du télétravail. A la moindre question plus poussée, ils font désormais appel à une LegalTech que la DRH avait toujours refusé de prendre : LegalBot qui permet en quelques minutes d’avoir les réponses à ses questions.
Fanny, tout comme Bill et Julien partent ce jour-là en télétravail l’après-midi.
Sur l’application compagnon des salariés développée en interne en début d’année, il leur suffit de déplacer le curseur “télétravail” sur « on » pour indiquer à tout le monde qu’ils ne sont plus au bureau mais qu’ils restent joignables et pour envoyer une notification aux 5 collègues avec lesquels ils échangent le plus et les prévenir. Toute la partie administrative des RH est désormais automatisée. Gérée grâce à plusieurs prestataires et à des outils internes, il n’y a plus d’erreurs humaines et le gain de temps et de salaire compensent largement le coût de ces outils.
Il est 14h et tout le monde, sauf Paul, reçoit une notification via slack signalant que c’est son anniversaire. Une équipe de 5 personnes se monte alors pour lui organiser une fête ce soir-là. Depuis la disparition du service communication interne, c’est par roulement que les salariés prennent soin de la vie sociale de l’entreprise. Ils regorgent alors de créativité et gèrent au mieux le budget alloué à ces événements.
Adieu Escape Game, Teambuilding en camping & annonce des anniversaires par un message insipide digne de ce qu’un chatbot pouvait faire il y a 5 ans. C’est la même chose pour le budget formation. Le fameux « catalogue » géré par un responsable formation a disparu.
Comme personne n’appréciait les formations par des organismes poussiéreux et trop chers sur 1 ou 2 jours, le budget formation est aujourd’hui autogéré.
Par rapport à différents indicateurs comme la performance de l’équipe, l’investissement et la participation à la vie de l’entreprise, chaque équipe est maîtresse de son budget. Entre du Coursera, du pair learning, des voyages apprenants ou des formations 100% “gamifiées”, ce n’est pas la créativité qui manque.
Cet après-midi a lieu le top départ des entretiens annuels.
Sans RH pour les gérer, cet évènement est désormais l’un des plus attendus de l’année. Ces entretiens se déroulent en effet désormais sous la forme de challenges inter-équipes.
On détermine un thème et un livrable et chaque année les équipes s’arrêtent pendant une semaine pour se concentrer sur leurs parcours professionnels à la fois de manière individuelle et collective.
Cela permet ainsi soit la création d’équipes experts dans une compétence particulière soit d’équipes complètes qui se coordonnent par rapport à leurs souhaits pour évoluer ensemble.
Après avoir trouvé le cadeau pour sa copine, Fanny apprend qu’elle doit remplacer l’un de ses collègues comptable qui partira bientôt. Elle commence alors à réaliser la phase préalable d’étude salariale.
Elle se connecte au Drive partagé et détermine le montant proposé en cohérence avec les salaires actuels.
Si Fanny peut le faire en tant que recruteur, tout le monde peut désormais accéder à cette information. Chacun a accès aux salaires des autres. La transparence et le partage d’informations sont généralisés à toute l’entreprise.
L’accès aux salaires permet aussi de faire les revalorisations collectives de ceux-ci. Chaque année, la décision d’être augmenté ne dépend plus des RH et des managers mais chaque salarié bénéficie d’un pack d’augmentation qu’il peut distribuer librement entre ses collègues et lui. Un “dilemme du prisonnier” nouvelle génération qui a largement porté ses fruits et fait le bonheur de tous. Les quelques comportements négatifs du début consistant à s’attribuer l’intégralité du pack d’augmentation ont cessé et tout le monde est juste dans sa répartition, souvent au profit des plus petits salaires.
Les managers ne sont en effet plus nommés ni selon des obscurs plans de succession, ni pour la simple raison d’une certaine ancienneté dans l’entreprise. Un manager le devient parce qu’il s’est formé auparavant. Il a émis ce souhait lors des événements collectifs et il a également investi dans cette évolution.
En effet, pour devenir manager chez Utop, il faut accepter de ne pas avoir de bonus l’année précédent sa promotion et de donner 10% de son salaire à des oeuvres de charité.
Le métier de manager est dur et nécessite un engagement, ce ne devrait pas être un cadeau en récompense d’une fidélité. Surtout qu’être manager, ce n’est pas forcément un cadeau. Avec de plus en plus de salariés issus de la génération Z à manager, c’est un métier en voie de disparition.
Contre toute attente, le lendemain, le 14 Février, les RH réapparaissent.
Ils découvrent leurs entreprises changées.
En mieux.
Complètement béats face à ce changement, fascinés par l’intelligence collective à l’oeuvre mais aussi par l’automatisation de la plupart des process, ils se reconvertissent progressivement.
Certains, notamment des experts en paye et en C&B se reconvertissent en experts financiers. D’autres, repartent à 0 et foncent droit vers leurs passions jamais assumées.
Enfin, certains, n’osant pas l’assumer auparavant, se (re)découvre une envie oubliée pour le recrutement, seule fonction RH ayant survécu à la disparition de 2020 (Allez savoir pourquoi ? 😉 )