Il y a quelques années des entreprises telles que Pathgather Degreed et EdCast ont eu l’idée de créer des plateformes qui facilitent la recherche de contenu de formations professionnelles. Les Learning Experience Platform étaient nées, et depuis leur marché explose.

Ainsi, en mai 2018, Gartner l’entreprise américaine de conseil et de recherche dans le domaine des techniques avancées, a publié l’étude « Market Guide 2018 for Corporate Learning Suites » et a fait émerger un nouveau segment de marché : les « Learning Experience Platform » (LXP). Ce nouveau portail prend de plus en plus d’ampleur et des milliers d’entreprises cherchent à remplacer leur Learning Management System (LMS) par une LXP. Les fournisseurs de LMS ont d’ailleurs tous sauté le pas vers ce nouveau marché.

Les distinctions des Learning Experience Platform

Dans le monde du digital learning, les plateformes LMS répondent à un besoin d’organisation : comment créer, stocker, diffuser, attribuer, mesurer des parcours d’apprentissage ? En d’autres termes, la « gestion » de la formation digitale est l’élément central de l’organisation.

Les LXP ont ensuite émergé pour aider les collaborateurs à s’y retrouver face à des catalogues de formation faramineux, permettre une plus grande personnalisation, des recommandations ou encore des parcours individuels de formation. Les Learning Experience Platform dépassent les seuls besoins des services de formation et s’intéressent davantage aux besoins de l’apprenant. Elles sont même centrées sur lui et son expérience avec un objectif central : faciliter la curation de contenu. Des Netflix ou Youtube de la formation en somme.

Selon le fondateur de EdCast, la mission de ces nouvelles plateformes est donc « d’indexer le monde de l’apprentissage » pour faciliter la recherche à travers plusieurs moyens (vidéos, articles, podcast, page web…).

Lors de leur émergence, les plateformes LXP ont été bien accueillies par les utilisateurs. Mais, avec l’accroissement toujours plus important du nombre de formations, le problème de la « découverte intelligente » s’est posé. Le marché se dirige vers une complexification de la découverte intelligente.

Le futur des recommandations

Trois modalités se développent en parallèle pour recommander du contenu pertinent aux apprenants : les recommandations basées sur les compétences, celles basées sur les usages et celles basées sur l’analyse et la création de contenu par l’intelligence artificielle.

Dans le premier cas les systèmes LXP modélisent les métiers selon une cartographie de compétences. Les utilisateurs se voient recommander des formations en fonction des compétences qu’ils ont, celles qu’ils veulent acquérir ou celles nécessaires à leur évolution vers un métier donné. Ce type de système peut demander beaucoup de travail pour être mis en place. Le Watson Talent Framework d’IBM par exemple compte plus de 3 000 emplois et plus de 2 000 compétences réparties dans 16 industries. Pouvoir cartographier toutes ces compétences à l’aide d’un LXP est un travail qui prendra beaucoup de temps.

Dans le deuxième cas, celui basé sur les usages, les LXP vont rassembler de grandes quantités de données afin de recommander les contenus en fonction de l’utilisation de l’ensemble des usagers : les plus vus, les derniers vus, ceux qui ont le plus de “like”. Cela pose néanmoins quelques problèmes. Lorsqu’un programme est largement utilisé, il devient largement recommandé et commence à « évincer » d’autres contenus susceptibles d’avoir plus de valeur et de crédibilité. On peut ainsi se retrouver à investir dans une LXP qui recommanderait des contenus erronés à certaines populations à cause de sa popularité auprès d’autres populations. Pour contrer cela certaines entreprises créent des communautés différentes. Mais dans ce cas quel contenu doit-on “pousser” aux équipes marketing de Chine ? Un contenu proche des équipes marketing de France ou des équipes RH de Chine ? Ces types de recommandations s’amélioreront dans le temps en s’aidant du machine learning.

La troisième approche est de loin la plus innovante et la plus puissante. Les fournisseurs intègrent du contenu d’instruction (texte, vidéo, audio) qu’ils vont analyser. En d’autres termes, ils lisent le contenu et comprennent « qu’est-ce-que cela essaye d’enseigner aux gens ? ». Volley.com, le leader du marché largement utilisé à Wall Street par exemple, peut parcourir la documentation Cybersécurité et créer des formations, du micro-learning et des évaluations de procédures de sécurité d’une banque. Cette approche a un grand potentiel car ce système permet d’identifier le « niveau d’expertise » et la « crédibilité » des informations par le biais d’une analyse pédagogique.

En plus de ces trois solutions, il en existe une autre : celle de demander au collaborateur. Dans un monde parfait l’apprenant pourrait communiquer à la plateforme son expérience, ses aspirations, ses objectifs, sa méthode d’apprentissage préférée, son niveau d’expertise par sujets etc. La plateforme serait ainsi un véritable chargé de formation artificiel au service du collaborateur. LinkedIn Learning semble être le plus en avance dans ce domaine.

L’évolution du marché

Aujourd’hui les entreprises ayant fait le choix d’investir dans une LXP pour favoriser l’engagement de leurs collaborateurs dans la formation l’ont implémentée par dessus leur LMS. Il paraît évident que très bientôt les entreprises chercheront à avoir une seule plateforme, un LMS qui cherche les bons contenus pour les collaborateurs, une LXP qui gère la partie gestion pour l’entreprise. C’est d’ailleurs pour cela que les différents fournisseurs de LMS s’engouffrent tour à tour sur le marché de la Learning Experience Platform.

Dans ce cas deux problèmes majeurs semblent ressortir. Le premier est la place de la formation nécessaire à l’entreprise. Ces plateformes permettent au collaborateur d’être investi dans sa formation et son employabilité et lui laisse la main libre sur ses choix de formation. L’entreprise doit quant à elle trouver comment elle peut mettre en avant les contenus dont elle a besoin pour son évolution au milieu et comment imposer ses formations obligatoires.

Le second problème est le stockage et la gestion des données. Actuellement la majorité des LXP ne stockent pas la donnée (ou ne vous la rendent pas accessible). Si elles fusionnent avec les LMS, comment sera gérée la donnée ? Et par qui ? Les services de formation vont-ils devoir recruter de véritables data scientists ?

En conclusion, les LXP présentent des avantages et des inconvénients, mais ils ont le mérite de remettre le collaborateur au centre de sa formation. Ces plateformes sont encore récentes mais représentent déjà un marché de 300 millions de dollars avec une croissance de 50% par an. Bien qu’encore loin des 4 milliards de celui des LMS, ce marché ne peut plus être ignoré.

Voir l’étude initiale (en anglais) : https://joshbersin.com/2019/03/learning-experience-platform-lxp-market-grows-up-now-too-big-to-ignore/

[su_note note_color=”#e3f2fd” radius=”5″]L’auteur de l’étude initiale, Josh Bersin, est intervenu lors du salon Unleash en octobre à Paris.
Retrouvez les grandes tendances du salon, le résumé des conférences et la présentation des startups présentes dans notre récap de UNLEASH 2019.[/su_note]

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